Page:Surell - Étude sur les torrents des Hautes-Alpes, 1841.djvu/103

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

l’ont pas encore établie d’elles-mêmes. Or, un pareil travail n’aboutirait à rien moins qu’à créer des lits de déjection artificiels, partout où ils ne sont pas complètement formés, c’est-à-dire à amonceler de véritables montagnes. — Remarquons toutefois que Fabre, en indiquant ce procédé dont le résultat était de donner au lit la plus forte pente possible, avait entrevu une partie des véritables difficultés qui s’opposent à l’encaissement des torrents. Je dis une partie, parce qu’il serait très-possible que la droite tirée de la gorge à la rivière ne donnât pas encore la pente-limite. La rivière est bien un des points obligés de cette pente, mais il n’en est pas de même du second point, pris à la sortie de la gorge : celui-ci pourrait être trop bas. À mesure que les dépôts s’entassent, l’origine de l’éventail remonte dans la gorge et relève ainsi la pente.

2o Système de M. Delbergue-Cormon.

On trouve dans l’ouvrage de M. de Ladoucette l’exposé d’un système d’encaissement proposé par M. Delbergue-Cormont, ingénieur en chef des ponts et chaussées[1]. — Il consisterait tout simplement à creuser au torrent un canal régulier, au milieu de ses déjections mêmes, et à entretenir ce canal à l’aide d’un curage assidu. Quelles que soient les précautions indiquées par l’auteur pour fortifier les berges de ce canal au moyen de plantations, et les assimiler à des digues continues, on comprend bien qu’elles ne présenteront jamais aux érosions une résistance suffisante. Elles tiendraient encore moins contre un exhaussement.

Il semble que ce système attribue tous les ravages des torrents à l’irrégularité de leurs lits, puisque, pour les faire cesser, il propose comme remède unique et suffisant de leur donner un lit régulier. C’est là prendre l’effet pour la cause. Si les torrents se répandent çà et là, ce n’est point parce qu’ils n’ont pas de lit régulier ; mais ils n’ont pas de lit régulier, par cette raison que, déposant continuellement, ils sont forcés de se répandre çà et là.

  1. « Mémoire dans lequel on essaie de faire voir que les communes peuvent, sans autres secours que leurs bras, se mettre à l’abri des torrents secondaires, par Delbergue-Cormont, ingénieur en chef. » — Voyez la note 9.