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HISTORIETTES ET FANTAISIES


Parfois Isidore se mettait en dépense pour sa sœur. Il lui achetait des pains d’épices. Le jour de la grande procession il lui présentait un parasol.

Isidore n’a jamais épaté la terre et j’oserais dire qu’il ne songe pas à cela.

Il y avait entre lui et sa sœur comme l’étoffe de deux vieilles personnes. Ni l’un ni l’autre ne semblait vouloir se marier. Isidore prévoyait que le capital de la communauté se doublerait sans effort en quinze ans, dépenses non incluses.

Un aussi beau rêve n’est pas de ce monde. L’amour mit des bâtons dans les roues.

Zétulbée se laissa prendre aux filets d’un garçon tailleur — taillé lui-même admirablement.

Dans la ville des Deux-Grêves où se passe cet histoire véridique, il y a nombre de beaux garçons, mais pas un seul n’est comparable à Lucien Gobédi, le majestueux, le délicat, le poétique, l’adorable Gobédi.

Zétulbée le vit et en fut éprise.

Isidore l’examina et le prit en grippe.

Deux natures en sens contraire. L’une est issue d’Harpagon ; l’autre est dépensière.

Gobédi demanda Zétulbée en mariage. Isidore refusa. Zétulbée trembla devant son frère et, malgré ses vingt-six ans, se soumit.

L’amant persista. Le mariage fut arrangé pour le 20 juillet tout dernier.


On fit même des emplettes,
On prépara des toilettes,
Toute la ville en parla.
Nous prenions un air de fête,
C’était à tourner la tête,
Mais l’affaire en resta là.