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HISTORIETTES ET FANTAISIES

La caille, enveloppée d’une belle feuille de vigne, quand vous en avez, se place dans le corps d’un perdreau, rouge s’il en est sous votre main.

Prenez ensuite une bécasse tendre, succulente, bien mortifiée, et confiez-lui le perdreau ; elle ne demandera pas mieux que de s’emplir ainsi.

La bécasse étant entourée de croûtes de pain tranchées bien minces, vous l’introduisez dans l’intérieur d’un canard sauvage, que vous choisissez de la taille voulue.

Le canard va parfaitement dans une poularde dodue, blanche, et savamment désossée.

Alors, si vous avez une jeune oie sauvage, grasse et attendrie, ne perdez pas de temps, enfilez-lui la poularde : c’est classique.

Les poules d’Inde, blanches et charnues, sont assez faciles à obtenir ; ayez-en une, et mettez-lui la jeune oie dans le corps. Rendu à ce point, vous avez fait une œuvre de haute école, mais ce n’est pas encore un chef-d’œuvre.

Poursuivez-donc. Il s’agit de se procurer une belle outarde, ce qui n’est pas rare sur le Saint-Laurent. L’outarde canadienne est peut-être la plus belle qui soit sur le globe. Je désire l’élever au rang de mets national, et c’est dans ce but que je lui ai préparé les farces dont vous venez de lire la description. Si vous me dites que j’exige des tours de force, c’est que vous êtes tiède et peu instruit des choses de la cuisine. Un certain degré d’enthousiasme devient nécessaire pour accomplir les opérations que je vous recommande ici ; une bonne dose de science ou de pratique culinaire n’y gâte rien non plus. Êtes-vous homme à bien faire, je suis avec vous. Ah ! vous avez cru que, parceque je ne sais pas la musique, j’ignore la cuisine ! À d’autres, dénicheur de merles. Revenons à nos outardes.