— Et Juillet, papa, est-ce Roméo et Juliette ?
— Hélas ! dit le père, c’est Jules César, comme qui dirait Napoléon. Il faut que nous soyons rudement arriérés pour en être encore à ce bonhomme. Le mois de Jules, mon fils ! Que tu dois te trouver heureux d’écrire pendant trente jours le nom de Juillet, qui veut dire Jules parce que César se nommait Julius !
Sans se décourager, l’enfant continua :
— J’ai calculé que le dixième mois tombe en Octobre, qui pourtant veut dire huitième mois ; et décembre, qui signifie dixième, est le douzième. C’est un peu mêlé.
— Tu as raison, mon fils, tout cela est de travers ; que veux-tu que j’y fasse ! Le monde marche à béquilles.
Très surpris, l’enfant s’aperçût qu’il embarrassait son père, et il se crut savant ou en train de l’être.
— Septembre ne veut-il pas dire septième mois ?
— Assurément. Tu sais, néanmoins, que c’est le neuvième. Eh bien es-tu satisfait à présent ?
Le père n’avait jamais fait ces observations. Elles le surprenaient et il en souriait en tournant les pages du dictionnaire.
— Alors, reprit l’enfant terrible, nous radotons douze fois par année en prononçant le nom des mois ?
— Onze fois seulement, car avril vient d’aprilis « qui ouvre, » parce que, en cette saison, la terre s’ouvre pour recevoir les semences. Voilà où nous en sommes, après trois, quatre ou cinq mille ans de travail et de dépense d’esprit ; nous avons réussi à nommer avec apropos l’un des mois du calendrier ! Si jamais nous arrivons à les baptiser tous correctement, il faudra user bien des siècles — et à ce compte la fin du monde est loin.