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LA GUIGNOLÉE



IL y a cinquante ans, si vous parcouriez les campagnes du Bas-Canada ou les quartiers français des villes de cette province, le soir du 31 décembre, vous entendiez sur la route un chant grave et traînant, un air ancien qui captivait l’attention du passant par son étrangeté tout d’abord, puis à cause de la saison qui prête si peu aux manifestations de ce genre. C’était la Guignolée, l’une de nos plus vieilles coutumes, laquelle remonte à trois mille ans et davantage, tout comme notre fête de la Saint-Jean-Baptiste dont l’origine s’égare dans les temps préhistoriques.

Aujourd’hui la mode est de refouler dans l’ombre ce qui rappelle de trop lointains souvenirs : — on dédaigne le gâteau des Rois, les visites du Jour de l’An, les courses de la Guignolée, la tire de la Sainte-Catherine, et à la place de ces amusements poétiques on adopte des jeux idiots pour développer la force brutale et gagner des rhumatismes.

Les Canadiens-français d’Ottawa comptent dans trois quartiers de la ville pour la moitié de la population et le soir de la Saint-Sylvestre ils lancent trois bandes de Guignoleux par les rues de ces parties de la ville.