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HISTOIRE DES CANADIENS-FRANÇAIS

roi. En secondes noces (1708) il épousa Marguerite-Renée Denys, veuve de Thomas de Lanaudière. Il mourut en 1715. L’un de ses fils, Joseph, né en 1676, portait le surnom de Lagorgendière ; en 1696 il était sous-enseigne dans les troupes. C’était un caractère décidé et un homme d’entreprises. Il fit de grandes opérations commerciales, devint le principal agent de la compagnie des Indes, seigneur de la rivière Chaudière, etc. À sa mort (1749) il avait eu de sa femme, Claire, fille de Louis Jolliet le découvreur, trente-deux enfants. L’un de ceux-ci, Joseph, né le 1er mai 1709, fut aussi agent de la compagnie des Indes et dirigea un immense commerce. On parle de ses maisons princières et de la générosité avec laquelle il dépensait ses revenus. Vers la fin de la guerre de sept ans, il sacrifia tout ce qu’il possédait pour soutenir l’armée de Montcalm ; on lui doit ainsi une large part de la gloire qui a rejailli sur le Canada dans cette défense prolongée. À sa mort en 1789, il n’avait pu recouvrer sa fortune. De sa femme, Marie-Catherine Véron de Grandmesnil, il avait eu plusieurs enfants dont le plus remarquable fut Louis-Joseph, né en 1756, qui étudia à La Flèche, en France, devint page du roi ; servit en 1775 au fort Saint-Jean d’Iberville ; fut nommé (1777) inspecteur de milice, et capitaine (1788) au 60e régiment ou Royal Américain. Major de brigade en 1793, grand ami du duc de Kent, il était à cette époque l’officier canadien-français le plus en évidence. Sir Robert Prescott lui confia (1796) la charge de député surintendant des Sauvages et en 1799 il devint aide-de-camp provincial ; il cumulait avec cela le rang de major au 60e. Devenu lieut.-colonel et quartier-maître de la milice du Bas-Canada durant la guerre de 1812-15, il rendit des services intelligents. En 1792, il avait épousé Gillette Boucher de Montarville qui lui donna Louis-François, avocat à Saint-Denis ; Guillaume, médecin à Montréal ; George, riche habitant du nord-ouest ; et Charles-Henri, avocat à Chambly.

Brock, officier intelligent et d’une activité supérieure, conçut le projet d’aller surprendre les Américains chez eux. Ce n’était pas dans un but de conquête mais pour montrer que ses troupes, si peu nombreuses qu’elles fussent, pouvaient faire respecter le territoire confié à leur garde ; après avoir assemblé la législature (28 juillet 1812) à York (Toronto) et expédié les affaires du moment, il se porta vers la frontière du Détroit, campa le 13 août à Amherstburg, prit la ville du Détroit, le 16, amena prisonnier le commandant de cette place, retourna sur ses pas et attendit l’ennemi sur la frontière du Niagara, entre les lacs Érié et Ontario. Une suspension d’armes s’en suivit.

Au mois de septembre, la milice de Montréal forma un autre bataillon appelé les Chasseurs Canadiens. On leva aussi un corps de voyageurs, principalement parmi les employés de la compagnie du Nord-Ouest. Vers le même temps, les Américains opérèrent une descente à Gananoque, établissement sans défense, et le mirent au pillage. Ce fut le commencement de ces coups de main de peu d’importance répétés si souvent durant les trente mois qui suivirent. En réponse, le 4 octobre, les Anglais tentèrent d’enlever Ogdensburg, mais sans succès. Le 9, près du Détroit, les Américains perdirent deux vaisseaux.

Sur la frontière du Niagara, le général Brock attendait l’armée étrangère. Ayant à dé-