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HISTOIRE DES CANADIENS-FRANÇAIS

reçurent injonction de partir. La législature se réunit le 16 juillet. Déjà les hostilités étaient commencées.

Les troupes anglaises ne dépassaient pas six mille hommes. Les américains avaient cent soixante et quinze mille hommes sous les armes. Ils attendaient, pour envahir le Canada, que Napoléon eut franchi le Niémen et signalé sa présence en Russie par quelque grande victoire propre à effrayer l’Angleterre et à l’empêcher de tourner ses regards vers l’Amérique. De plan de campagne, ils n’en avaient pas. Tout consistait à nous écraser par des masses de troupes si les affaires d’Europe devenaient assez graves pour retenir là-bas l’armée anglaise. Quant à nous, c’était bien différent : nous nous défendions. L’attaque était subordonnée aux succès ou aux revers de Napoléon en Russie. Cette entente remontait au décret de Berlin (1807) alors que le vainqueur d’Iéna avait ordonné la fermeture des ports de l’Europe au commerce anglais. Le prétexte dont se servirent les Américains pour entrer en difficulté avec l’Angleterre fut le droit de visite des Anglais à bord des navires des États-Unis pour y rechercher les matelots déserteurs.

Le général Brock écrivit, le 26 juin, au capitaine Roberts, qui tenait un poste au nord-ouest de Michillimakinac, lui donnant connaissance de la déclaration de guerre. Le 8 juillet Roberts et M. Toussaint Pothier appelèrent à eux les voyageurs de la compagnie du Nord-Ouest. Le 17 juillet Michillimakinac capitulait. Le 3 juillet, sur la rivière Détroit, le lieutenant Rolette avait enlevé le Cayaga, et le 7 du même mois un convoi de bateaux.

Charles-Frédéric Rolette, frère de Joseph, cité ailleurs, avait servi d’abord sur un navire de guerre anglais et reçu cinq blessures à Aboukir et à Trafalgar. De retour en Canada (1807) il fut nommé lieutenant dans la marine provinciale et promu premier lieutenant et au commandement du brick Hunter sur le lac Érié, en 1812. Le 3 juillet, il s’empara, avec six hommes, de la goélette américaine Cayaga Packet ; au combat de la rivière Raisin, le 22 janvier 1813, il servit comme officier d’artillerie et reçut une blessure à la tête. Mêlé à plusieurs escarmouches et engagements, il se conduisit en brave, notamment le 10 septembre 1813 sur le lac Érié, où il fut blessé de nouveau à la tête des forces navales de cette région. Ses prises, durant cette guerre, sont au nombre de dix-huit. On le cite pour sa belle conduite au Détroit. La paix arrivée, les citoyens de Québec lui présentèrent un sabre d’honneur ; il mourut dans cette ville le 17 mars 1833, des suites de ses blessures.

Dans le Bas-Canada, on plaça un cordon de troupes régulières et de milice, depuis Yamaska jusqu’à Saint-Régis ; les 8e ; 41e, 100e régiments, et le corps de Fencibles en formèrent partie. Au milieu de l’été arrivèrent à Québec le 103e et un bataillon du 1er ou Royal Scots. Le 5 juillet, les troupes anglaises partirent de Québec, laissant la ville à la garde des miliciens. Bientôt après, même chose eut lieu à Montréal. Le 18, la chambre d’assemblée terminait ses travaux, après avoir voté les billets d’armée, ou crédit de guerre, avec un élan et une générosité remarquables.

Le bras droit de sir George Prevost dans l’organisation des milices fut le lieutenant-colonel Vassal de Montviel. Nous avons de lui un mémoire daté de 1810, écrit à tête reposée, et qui est loin d’être aussi pratique que l’on pourrait se le figurer de la part d’un mili-