supplé, et quelquefois va trop loin. Il n’y a d’autres ecclésiastiques que des capucins et des jésuites. Le roi y entretient deux cents nègres ouvriers pour les divers ouvrages ; l’ordonnateur les emploie communément à son utilité, et il en coûte encore cher au roi pour les nourrir. M. Le Normant, aujourd’hui adjoint au ministère de la marine, est le seul qui les ait véritablement employés au service du roi. »
Parlant de l’année 1762, M. Gayarré dit : « La conquête du Canada par les Anglais avait causé une émotion pénible à la Louisiane, qui lui était unie par tant de liens, et qui, pendant longtemps, en avait formé une dépendance. Un pressentiment vague, et qui fut bientôt vérifié, faisait craindre aux colons un changement de domination. En effet, le 13 novembre le roi d’Espagne acceptait, sous sceau privé, le don que le roi de France lui faisait de la Louisiane. » Cette convention ou cession, resta quelque temps ignorée.
En 1764, M. Foucault écrivait au ministre : « J’ai l’honneur de vous informer qu’il est arrivé ici, il y a peu de jours, plusieurs familles acadiennes, faisant nombre de cent quatre-vingt treize personnes. Elles ont passé de l’Acadie à Sainte-Domingue, où elles se sont embarquées sur un bâtiment marchand pour se rendre ici. Il m’a paru que la religion est le seul motif qui les ait déterminées à laisser leur pays. Elles sont pauvres et dignes de pitié. En effet, je n’ai pu me refuser à leur accorder la subsistance, jusqu’à ce qu’elles aient choisi des terres au quartier des Apéloussas et qu’elles soient en état de se passer de secours. » « Le 13 mai, il annonçait encore la venue de quarante-huit familles acadiennes. Il en était déjà arrivé, depuis le commencement de l’année, un assez grand nombre, formant un total de quatre cent soixante-treize personnes, que l’on avait dirigées sur les Attakapas, sous le commandement d’Andry. Ces quarante-huit familles, dit Foucault, demandent des terres qu’il est facile de leur accorder. On leur en donnera aux Apéloussas et aux Attakapas, où sont les autres, mais elles sont dans la misère. Comment les transporter sur ces terres ? Comment les faire vivre, jusqu’à ce que la culture les ait mises à l’abri du besoin ? Comment leur procurer les instruments de culture nécessaires ? Ce sont d’assez fortes dépenses, et si, comme on l’assure, il doit arriver incessamment mille familles, ce sera un objet important. Je demande donc des instructions. »
Au mois de février 1766, de nouvelles familles acadiennes arrivèrent au nombre de deux cent seize personnes. Elles étaient allées chercher le seul point de l’Amérique septentrionale où flottait encore la bannière de France. Elles espéraient pouvoir y vivre en paix, dans l’exercice de la religion et sous l’empire de lois qui leur étaient familières. Les premières familles qui s’étaient réfugiées à la Louisiane en attiraient d’autres. La levée et la place publique de la Nouvelle-Orléans étaient souvent couvertes d’une foule de ces malheureux exilés, qui venaient chercher une asile, là où ils espéraient trouver des frères et où l’on parlait encore leur langue. Ils ne s’étaient pas trompés. Jamais l’humanité ne se montra plus affectueuse ; jamais la charité ne fut plus abondante dans ses largesses. On leur fournit des outils aratoires aux frais du gouvernement, et, pendant la première année de leur établissement, on leur distribua les mêmes rations que celles que l’on donnait aux troupes de ligne