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HISTOIRE DES CANADIENS-FRANÇAIS

« Il est incontestable que, pour le partage qui a été fait pour l’étendue de chaque cure ou mission, il y en a peu qui n’aient plus que la portion réglée congrue par les dîmes des grains seulement comme elles se sont perçues jusqu’à présent, et que, quelque changement qu’on voulût y faire, ce ne serait que pour donner du superflu aux curés, à la charge des peuples ; — et comme ces publications des dits curés sont une entreprise contre l’autorité séculière, il est d’importance d’en empêcher la continuation et les inconvénients qui en pourraient résulter.

« C’est pourquoi, le dit procureur-général du roi requiert qu’après s’être fait représenter l’édit de Sa Majesté du mois de mai mil six cent soixante et dix-neuf et les lettres patentes du mois d’avril mil six cent soixante et trois, il soit ordonné que les dits sieurs curés de l’Ange-Gardien et de Beauport viendront en personne rendre compte au Conseil de quelle autorité ils ont fait la dite publication, pour, sur leurs réponses, être par lui pris telles conclusions qu’il appartiendra, et que, cependant, il soit fait défense aux dits curés de l’Ange-Gardien et de Beauport, et à tous autres, de faire aucune publication pour innover dans la conduite qu’on a tenue jusqu’à présent dans le payement des dîmes, et à tous les habitants de ce pays de payer d’autres dîmes que celles des blés et de toutes sortes de grains, comme il s’est pratiqué depuis ce temps-là jusqu’à présent, sous telle peine qu’il appartiendra. »

Un édit du roi, daté de Marly, le 12 juillet 1707, se lit comme suit : « Vu au conseil d’état du roi la requête présentée en icelui par les curés et missionnaires de Canada, contenant que persuadés de la protection de Sa Majesté pour l’église de cette Nouvelle-France, et de son attention pour le soutien de ses privilèges, qu’elle a toujours maintenus toutes les fois qu’on y a voulu donner atteinte, ils viennent avec confiance implorer l’autorité de Sa Majesté dans une affaire qui intéresse toute l’église de ce pays, puisqu’il s’agit de la perception des dîmes, sans lesquelles elle ne peut subsister, et dont néanmoins le conseil de Québec leur interdit la jouissance, jusqu’à ce que Sa Majesté ait déclaré de rechef ses intentions, quoiqu’elle les ait formellement expliquées par son édit du mois d’avril 1663, lors de l’établissement des cures de Canada en ces termes : — que toutes les dîmes, de quelques natures qu’elles puissent être, tant de ce qui naît en Canada par le travail des hommes, que de ce que la terre produit d’elle-même, se payeront de treize portions une,[1] et que le clergé de Canada jouira de la totalité des dîmes, grosses et menues, anciennes et nouvelles, de tous les fruits généralement quelconque et sans aucune distinction, qui proviendront de toutes les terres dans le pays de la Nouvelle-France, ce que les sieurs de Tracy, de Courcelle et Talon, lieutenants-généraux et intendant pour Sa Majesté, en ce pays, trouvèrent si nécessaire pour la subsistance des curés, qui d’ailleurs n’avaient aucun autre moyen pour vivre, firent un règlement en 1667, pour l’exécution de cet édit, par lequel considérant l’état du pays, pour lors encore très peu défriché et habité, le climat fâcheux, les saisons inconstantes, et les chemins tout-à-fait impraticables, ordonnèrent que les dîmes se payeraient de tout ce qui

  1. Voir le présent ouvrage, IV, 99-104.