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HISTOIRE DES CANADIENS-FRANÇAIS

forma, comme on pouvait s’y attendre. Le 5 octobre 1710, le général Nicholson se présenta devant Port-Royal avec cinquante et un bâtiments et trois mille cinq cents hommes de troupes. Durant neuf jours, Subercase résista à toutes ces forces, lui qui n’avait pas trois cents hommes, habitants[1] compris, à sa disposition. Saint-Castin, accompagné de quelques sauvages tenta l’impossible pour seconder les efforts de la place. Les corsaires étaient en course bien loin, on ne pouvait compter sur eux. Enfin, le 16, Subercase capitula, sortant avec les honneurs de la guerre et vendant, chose curieuse, son artillerie à Nicholson, qui la lui paya sept mille cinq cents livres — pour acquitter les dettes du roi de France. Dès le lendemain la flotte anglaise fournissait des vivres aux habitants, car la disette était extrême. Saint-Castin accompagna l’officier qui se rendit à Québec, au nom de Nicholson, annoncer la prise de Port-Royal. « La garnison, dit M. Rameau, et les officiers, au nombre de cent cinquante-six hommes, furent embarqués pour la Rochelle ; les employés, quelques marchands et engagés et même un petit nombre d’habitants qui voulurent profiter de la capitulation se firent transporter à Nantes où ils arrivèrent le premier décembre 1710 ; le tout formait deux cents cinquante-deux personnes, y compris les femmes et les enfants. On comptait du reste parmi eux fort peu d’habitants, car en comparant le recensement de 1707 et celui de 1714, qui sont l’un et l’autre nominaux, on retrouve dans le second toutes les familles citées dans le premier, à l’exception de dix-neuf parmi lesquelles quatre avaient quitté Port-Royal, pour aller à Chipody ou aux Mines ; on ne peut donc pas évaluer à plus de quinze le nombre des familles qui retournèrent en France à cette époque, et ces familles étaient toutes d’un établissement récent dans le pays, il est facile de s’en convaincre par l’étude des recensements ; de sorte que toutes les vieilles souches acadiennes demeurèrent sur les héritages où leurs pères vivaient déjà depuis trois ou quatre générations. » L’année suivante, la population se soumit à l’Angleterre et en 1713 les droits de cette puissance furent reconnus sur toute l’Acadie par le traité d’Utrecht.

  1. Charles de Latour, du cap Sable fut dangereusement blessé à ce siège.