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HISTOIRE DES CANADIENS-FRANÇAIS

embrassait l’Acadie : du cap des Rosiers au fort de Pentagoët, on compte à peu près cent lieues en ligne droite ; par mer il y a trois cents lieues ; la grande baie dite du Saint-Laurent, allait du détroit de Canseau au cap des Rosiers, soit cent vingt lieues, formait comme une portion distincte qui avait autrefois appartenu à Nicolas Denys[1] ; M. de Frontenac demandait au roi (1681) de nommer son fils Richard Denys de Fronsac pour le remplacer ; on voit en 1685 que celui-ci demeurait à Miramichi, et que, l’année précédente, il avait donné au séminaire de Québec un terrain de trois lieues à la rivière Sainte-Croix, dont M. Pierre-Louis Thury, prêtre, avait prit possession.

La compagnie des sieurs Bergier, Gautier, Bouthier et autres se plaignait de ce que le sieur de la Vallière attirait les Anglais, mais les Acadiens, n’ayant que peu ou point de rapports avec la France, n’hésitaient aucunement à acheter les marchandises de l’étranger, Bergier, Gautier et compagnie avaient leur quartier-général à Chédabouctou, l’ancien poste de Nicolas Denys. Les Anglais de Boston entraient de préférence dans la baie Française et traitaient à Port-Royal, au fleuve Saint-Jean et à Beaubassin. Le sieur de Lamothe-Cadillac, arrivé en Acadie vers 1680, écrivait au ministre, lui demandant de permettre le commerce avec les Anglais. Cependant, la compagnie de pêche l’emporta et M. Perrot, gouverneur de Montréal, remplaça M. de la Vallière (automne de 1684). La différence entre les deux c’est que ce dernier trafiquait moins pour son compte que ne le faisait M. Perrot. Au mois de novembre 1686, le sieur de la Vallière demeurait encore à Beaubassin ; l’année précédente, il avait reçu dans son manoir M. de Meulles, intendant du Canada, qui était venu de la mer par l’isthme de la baie Verte. Il y avait alors cent cinquante âmes à Beaubassin, à part trois familles de sauvages chrétiens. L’Acadie comptait trente soldats pour toutes garnisons. On en demandait cinquante autres ; ils furent refusés. Le chef-lieu était toujours Port Royal ; M. de Villebon y commandait en l’absence de M. Perrot ; M. Louis Petit, prêtre, nommé vicaire-général en 1676, demeurait en ce lieu.

René Robineau, baron de Portneuf, était beau-frère de M. de la Vallière ; c’est à cette parenté que l’on doit la présence en Acadie, de (1686 à 1713) cinq fils du baron, portant respectivement les noms de Menneval, Villebon, Portneuf, Des Isles et Neuvillette. Un sixième enfant (troisième d’âge) fut le baron de Bécancour, marié à Marie-Charlotte Le Gardeur. Cette famille demeurait à Portneuf en 1681. Villebon, capitaine des dragons du roi, avait servi au lac Ontario dans la campagne de 1684, en qualité de major de brigade ; M. de la Barre le regardait comme son bras droit. En 1687, on le voit député vers le gouverneur Dongan au sujet d’un navire saisi à Pentagoët par les Anglais. L’année suivante, de concert avec Saint-Castin, il s’occupa de relever de ses ruines le fort de ce dernier endroit.

  1. Il était devenu aveugle à Paris, en 1678, où il sollicitait le renouvellement de son privilége.