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HISTOIRE DES CANADIENS-FRANÇAIS

suisses. — Lieutenant Lavergne, il n’y a qu’un an qu’il est dans la colonie, où il avait déjà servi ; sage et fort actif. — Lieutenant Monbereau, arrivé depuis un an. — Cadets à l’éguillette, réformés. — Laperlière, né 1714. — Des Essarts, sert depuis quatre ans. — Le Corbier, né 1718 ; ex-page de la vénerie ; sert depuis trois ans ; sage. — Ballet, l’aîné, né 1718 ; venu il y a deux ans. — De Gruize, né 1717 ; a servi en France ; venu depuis un an. — Montreuil, né 1717 ; a servi dans les cadets de Metz ; venu il y a un an ; sage, exact à son service. — Labèche, né 1718 ; a servi dans les cadets en France. — Marigny de Mandeville, fils d’un ancien capitaine du pays, il sert depuis quatre ans avec application ; sage. — Tersigny, né 1715 ; venu il y a un an. — Massé, né 1720 ; fils d’un lieutenant réformé tué par les Natchez ; il sert depuis sept ans. — Trudeau, né 1722 ; fils d’un conseiller.

Il n’en a pas été de la Louisiane comme du Canada sous le régime français. Le Canada a bien passé par les mêmes épreuves mais il avait eu le temps de se fortifier avant la conquête anglaise, tandis que la Louisiane, de création plus récente, en était à ses débuts lorsque le malheureux règne de Louis XV vint s’ajouter aux défaillances de celui de son aïeul. Bienville est presque le seul homme des quarante premières années de la Louisiane qui mérite les égards de l’historien. Il voulait sincèrement fonder une colonie ; il avait étudié les ressources de la contrée et croyait à l’avenir de celle-ci, mais toutes les influences en jeu s’opposaient à ce genre d’entreprise. On voit que les règlements des compagnies gênaient l’agriculture. Vingt ans après 1740 les habitants se nourrissaient encore des provisions achetées en France.

La fin de l’administration de Bienville ne pouvait, au milieu de ces circonstances, être très brillante. Il s’en montra affecté tout en exposant à la cour les besoins impérieux de la population confiée à ses lumières. Ce qui contribua quelque peu à chagriner son cœur fut la présence de M. de Noailles d’Aime, mis à ses côtés pour l’aider de ses conseils à la guerre, mais qu’il regardait comme un censeur ou même un espion.

La dernière paix était à peine conclue avec les sauvages qu’il devint évident qu’elle ne durerait pas. Et le roi n’envoyait pas de troupes — pas non plus de présents pour les tribus alliées dont la fidélité dépendait de la quantité et de la valeur des marchandises qu’on leur donnait. Vers cette époque (1740) Bienville était devenu mécontent de tout ce qui se passait autour de lui — nous ne dirons pas qu’il avait tort, mais il tenait trop à l’esprit de parti et luttait contre ses adversaires comme au temps où ceux qui le suivaient aveuglement avaient confiance en sa jeunesse et en ses talents. Habitué à regarder la Louisiane en fondateur, il gémissait de ne pas la voir prospérer et se montrait soupçonneux envers les personnages qui semblaient chercher à y pénétrer.

De l’étude des soixante premières années de la Louisiane, il ressort que la vie active de cette province était due aux Canadiens qui non seulement y avaient fondé les meilleurs établissements, mais fournirent, durant cette longue période, les deux gouverneurs les plus remarquables : Bienville et Vaudreuil. C’était à l’organisation de nos coureurs de bois que le commerce des compagnies devait le peu de prospérité dont il jouissait. Les cultivateurs