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HISTOIRE DES CANADIENS-FRANÇAIS

Dans un centre qui n’est pas Québec port de mer, ni Montréal, placé sous la direction spéciale d’un ordre religieux, dans le gouvernement des Trois-Rivières en un mot, nous n’avons relevé qu’un nombre insignifiant de procès durant le xviie siècle, à tel point que nous nous sommes demandé si la plupart des contestations n’étaient pas arrangées à l’amiable, au lieu de paraître en cour. Ce procédé était tout à fait dans les mœurs normandes des anciens temps. On évite ainsi les frais et le scandale. Il ne reste rien d’un débat réglé à huis clos. Et puis, en cas d’appel au lieutenant-général d’un gouvernement ou district comme on dit de nos jours — il y avait chance de tomber sous la main de gens étrangers à la seigneurie ou paroisse des intéressés. C’était bien pis lorsque le conseil supérieur prenait connaissance de l’affaire. Là, tout se décidait ex parte, vu l’impossibilité de surveiller soi-même sa cause, car les distances comptaient à cette époque ! Il a donc dû se former une pratique : celle de la justice administrée en bon père de famille. Nous en voyons des traces dans plusieurs litiges, notamment au lendemain de la conquête anglaise, lorsque les habitants, mis en face de juges et de fonctionnaires qui ne les comprenaient point, firent décider leurs différends par le curé, le capitaine de milice et un notable de l’endroit.