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HISTOIRE DES CANADIENS-FRANÇAIS

Cependant, on craignait, à Québec, l’apparition de la flotte anglaise. M. de Ramesay eut ordre de decendre avec toutes ses troupes, et il mit pour commander à Montréal le baron de Longueuil. M. de Catalogne avait été laissé à Chambly avec des Canadiens ; le fort venait d’être restauré par eux lorsque arriva injonction de l’abandonner. Toutefois le gouverneur général changea d’idée et Paul d’Ailleboust de Périgny qui y commandait fut remplacé par M. des Bergères. « On envisagea les conséquences de fortifier Chambly ; messieurs les intendants ordonnèrent des fonds pour cette dépense et obligèrent tous les habitants du gouvernement de Montréal d’y donner chacun huit jours de corvée, et pour que l’année suivante on pût commencer ces ouvrages et les mettre en état de défense, on m’ordonna de m’y transporter l’automne, pour y faire amasser des matériaux, et pendant tout l’hiver on tailla les pierres angulaires, portes et fenêtres. Dès le printemps (1710) on commença les fouilles, et l’automne toute l’enceinte fut élevée à douze pieds de hauteur. » Ces lignes sont de M. de Catalogne qui jugeait qu’il était plus important de fortifier Chambly que Montréal.

La flotte anglaise entra dans le Saint-Laurent, en 1711, et périt avant que d’être signalée à Québec. L’année suivante on apprit que les Outagamis avaient été défaits au Détroit, ce qui rétablissait le calme dans l’ouest. Dubuisson avait appelé à son aide six cents Hurons et autres sauvages qui le secondèrent valeureusement ; le siège du Détroit (1712) fut un événement remarquable, car pour écraser cette nation féroce il fallut employer la ruse et la force ouverte. Dans la poursuite de l’ennemi qui eu lieu après la levée du siège, le sieur Bissot de Vincennes rendit de signalés services. On a toujours attribué ce mouvement agressif des Outagamis à l’instigation des Anglais qui, se sentant victorieux dans la guerre d’Europe, et voyant s’écrouler la puissance de Louis XIV, tachaient d’en profiter pour s’emparer du commerce de l’ouest. Il paraîtrait, par le rapport de Debuisson, que les habitants français du Détroit possédaient déjà un bon nombre de bestiaux. On ne dit pas quand Dubuisson fut remplacé, mais aussitôt après ces événements, le gouverneur-général envoya dans l’ouest M. de La Porte de Louvigny, accompagné de plusieurs officiers de mérite, pour raffermir l’influence française dans ces quartiers. C’est probablement alors que M. de Laforêt reprit le commandement de Détroit ; nous voyons que, en 1714, il écrivit un mémoire demandant que le fort fût commis à la garde d’une petite troupe et converti en poste de traite, sous la conduite des militaires, en éloignant les colons qui, disait-il, étant trop exposés aux coups des Sauvages, ne pouvaient se suffire à eux-même. Son projet ne fut pas écouté.