Page:Sulte - Histoires des Canadiens-français, 1608-1880, tome V, 1882.djvu/168

Cette page a été validée par deux contributeurs.
152
147
HISTOIRE DES CANADIENS-FRANÇAIS

sans doute dans les bateaux[1] plats dont il est fait si souvent mention vers la fin du dix-septième siècle. Dix-neuf ménages s’appliquaient à la culture et récoltaient tout juste de quoi suffire à leur consommation. Si la conclusion du rapport de M. d’Égremont ne fut pas adoptée on n’en réduisit pas moins les dépenses au stricte nécessaire. Un seul capitaine, M. de la Forêt, avec sa compagnie, se trouva chargé du poste et du pouvoir de prélever sur les commerçants de fourrures ce qui était nécessaire pour nourrir ses soldats. Quant à Lamothe-Cadillac, descendu à Québec l’année 1709, il y fut encore arrêté et ne retourna plus au Détroit. On l’envoya gouverneur à la Louisiane. En 1710, on cite comme commandant du Détroit Guyon-Dubuisson dont la fille épousa Charles-Henri de Tonty. Les Guyon-Dubuisson étaient de la famille de Thérèse Guyon, femme de Cadillac. Cette année la garnison était de trente hommes. Les Outagamis ou Renards se rapprochaient en ce moment du fort pour exécuter un plan de massacre longuement conçu.

Le fort anglais de Saint-Jean de Terreneuve n’avait pas été pris. Il renfermait neuf cents hommes et quarante-huit pièces de canon. Dans la nuit du 1er  janvier 1709 M. de Saint-Ovide l’attaqua et le força de capituler. C’était une conquête de toute importance. Parmi les Canadiens qui montèrent à l’assaut des remparts de Saint-Jean, on cite D’Ailleboust d’Argenteuil, D’Ailleboust, La Chesnaye, Duplessis et le baron de Joannès qu’on peut regarder comme Canadien. Il y aurait une longue liste à dresser des noms des officiers canadiens qui servirent dans l’armée, la milice et les corps volontaires, de 1680 à 1760. En lisant les historiens, presque tous ces officiers nous apparaissent comme Français, et l’erreur est d’autant plus fréquente que bien souvent il est difficile de distinguer entre ceux qui commandent les milices ou les troupes régulières. Une revue américaine a relevé les noms (bien connus parmi nous) des militaires qui ont ravagé les colonies anglaises et elle les donne pour des « Français de France » ; examen fait, tous sont Canadiens.

Les préparatifs que le général Nicholson faisait du côté du lac Champlain, décidèrent M. de Ramesay, gouverneur de Montréal, à réunir une petite armée autour de Chambly, composée d’un bataillon des troupes sous les ordres de M. de la Chassagne, et de deux bataillons de milice, dont un commandé par M. de Lignery, et il prit lui-même la direction du tout. À la fin de juillet (1709) ces trois bataillons se mettaient en route pour aller surprendre le nouveau fort des Anglais, mais parvenu à la Pointe-à-la-Chevelure, les Iroquois les découvrirent et donnèrent l’alarme. On s’avisa d’écrire une lettre et de la laisser sur le chemin en se retirant ; les éclaireurs anglais la ramassèrent et tout leur camp apprit avec terreur des nouvelles fausses concernant l’arrivée de secours de France, etc., si bien que l’invasion projetée par le lac Champlain fut regardée comme impossible. Jacques Testard de Montigny, Pierre-Thomas Tarieu de la Naudière (appelé La Pérade), Trottier des Ruisseaux et M. de Catalogne sont cités dans cette expédition.

  1. En 1696, lors de l’expédition contre les Onnontagués, M. de Frontenac montait un bourriquot et M. de Callières un cheval qu’ils avaient amenés sur les bateaux.