Page:Sulte - Histoires des Canadiens-français, 1608-1880, tome V, 1882.djvu/159

Cette page a été validée par deux contributeurs.
144
HISTOIRE DES CANADIENS-FRANÇAIS

Canadiens tués dans cette rencontre. D’Iberville[1], qui avait été fait capitaine de frégate, arriva de France à Québec (1694) avec deux navires de guerre convoyant une grosse flotte marchande ; de là il se rendit à la baie d’Hudson et enleva le fort Nelson, où fut tué son frère, Louis Le Moyne de Chateauguay. En même temps, le marquis de Nesmond devait se rendre avec une escadre devant Boston ; M. de Frontenac, à la tête de quinze cents hommes, se préparait à le rejoindre par la route de Pentagoët ; M. de Vaudreuil partit de Montréal avec des troupes, mais rendu à Sorel, il apprit que l’expédition n’aurait pas lieu parce que M. de Nesmond n’arrivait pas et que les gens de Boston s’était mis en état de défense. Cette année on construisit une redoute au cap Diamant, Québec, un fort au château Saint-Louis et les portes Saint-Louis et Saint-Jean.

Il n’y eut pas d’incursion iroquoise dans le Bas-Canada, l’année 1695. En revanche, des troupes et des milices commandées par MM. de Louvigny, de Repentigny et de Catalogne surprirent les chasseurs de cette nation aux environs de Cataracoui et leur infligèrent une défaite propre à les faire réfléchir. À cette époque, les Onnontagués se montraient les plus dangereux ennemis des Français et des Canadiens. M. de Frontenac résolut de les réduire ; il assembla toutes ses forces, à peu près trois mille hommes, et partit, accompagné de MM. de Callières, Vaudreuil et Louvigny pour ravager le canton de ce peuple. L’armée entra (juillet 1696) dans la rivière qui porte leur nom, mais elle ne trouva partout que des ruines : chaque famille avait incendié sa cabane et s’était réfugiée dans les bois. En repassant à Cataracoui, M. de Frontenac y laissa M. de Louvigny pour commander. Les Onnontagués, humiliés, mais non terrassés, reçurent des secours des Anglais et des tribus sauvages ; ils reparurent immédiatement aux alentours des paroisses du Bas-Canada. Cinq ou six des captifs qu’ils traînaient dans ces courses parvinrent à s’évader et à rentrer à Montréal. La disette était générale dans la colonie, aussi la flotte de M. des Ursins qui arriva à Québec l’été de 1697 y fut-elle reçue avec joie. Le dernier coup de la guerre devait être porté par les Abénaquis de Saint-François, qui massacrèrent la garnison de Guarfil, petit fort situé près de Boston. Au printemps de 1698, on apprit la nouvelle de la paix de Ryswick. Les Iroquois voulurent cependant continuer la guerre, mais deux ou trois de leurs principaux chefs étant mort sur ces entrefaites, il envoyèrent des délégués à Montréal ; les négociations traînaient en longueur lorsque, au mois de novembre 1698, M. de Frontenac mourut. Aussitôt, M. de Callières, dont le frère avait été l’un des plénipotentiaires au traité de Ryswick et qui comptait sur cette protection, dépêcha secrètement de Montréal en France Augustin Le Gardeur de Courtemanche, par voie d’Albany et New-York. De leur côté MM. de Champigny et de Vaudreuil, qui aspiraient à la charge de gouverneur-général, firent partir de Québec Charles-Joseph Amyot, sieur Vincelot, par voie de Pentagoët, porteur de lettres en leur faveur. On peut imaginer la surprise des deux Canadiens se rencontrant à Paris, chez le ministre. Courtemanche avait devancé Vincelot de quelques heures, et le roi s’était prononcé pour M. de Callières.

  1. Marié à Québec, le 8 octobre 1693, avec M.-Thérèse, fille de François Pollet de la Combe Pocatière, capitaine au régiment de Carignan.