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HISTOIRE DES CANADIENS-FRANÇAIS

« Pourra la dite compagnie comme seigneurs haut-justiciers de tout les dits pays, établir des juges et officiers partout où besoin sera… ; et où il sera besoin d’établir des conseils souverains, les officiers dont ils seront composés nous seront nommés et présentés par les directeurs généraux de la dite compagnie ; et sur les dites nominations les provisions seront expédiées…

« Seront les juges établis en tous les dits lieux, tenus de juger suivant les lois et ordonnances du royaume, et les officiers de suivre et se conformer à la coutume de la prévôté et vicomté de Paris, suivant laquelle les habitants pourront contracter sans que l’on y puisse introduire aucune coutume pour éviter la diversité.

« Et pour favoriser d’autant plus les habitants des dits pays concédés, et porter nos sujets à s’y habituer, nous voulons que ceux qui passeront dans les dits pays jouissent des mêmes libertés et franchises que s’ils étaient demeurant en ce royaume, et que ceux qui naîtront d’eux et des sauvages convertis à la foi catholique, apostolique et romaine soient censés et réputés regnicoles et naturels français… et que les artisans qui auront exercé leur art et métier au dit pays pendant dix années consécutives… soient réputés maîtres de chefs-d’œuvres en toutes les villes de notre royaume où ils voudront s’établir sans aucune exception[1].

« Après les dites quarante années expirées, s’il n’est jugé à propos de continuer le privilège du commerce, toutes les terres et îles que la compagnie aura conquises, habitées et fait habiter, avec les droits et devoirs seigneuriaux et redevances qui seront dus par les dits habitants, lui demeureront à toute perpétuité en toute propriété, seigneurie et justice, pour en faire et disposer ainsi que bon lui semblera, comme de son propre héritage, comme aussi des forts, armes et munitions, meubles, ustensiles, vaisseaux et marchandises qu’elle aura dans les dits pays, sans pouvoir être troublée, ni que nous puissions retirer les dites terres et îles pour quelque cause, occasion et prétexte que ce soit, à quoi nous avons renoncé dès à présent, à condition que la dite compagnie ne pourra vendre les dites terres à aucuns étrangers sans notre permission expresse.

« Et pour faire connaître à la dite compagnie comme nous désirons la favoriser par tous moyens, et contribuer de nos deniers à son établissement et à l’achat des vaisseaux et marchandises dont elle a besoin pour envoyer aux dits pays : nous promettons de fournir le dixième de tous les fonds qui seront faits par la dite compagnie, et ce, pendant quatre années, après lesquelles la dite compagnie nous rendra la dite somme, sans aucuns intérêts ; et en cas que pendant les dites quatre années elle souffre quelque perte, en la justifiant par les comptes, nous consentons qu’elle soit prise sur les deniers que nous aurons avancés ; si mieux nous ne voulons laisser le dit dixième par nous avancé dans la caisse de la dite compagnie, encore pour autres quatre années, le tout sans aucun intérêt, pour être à la fin des dites huit années fait un compte général de tous les états de la dite compagnie ; et en cas qu’il se

  1. La charte de 1687 renferme le même privilège.