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HISTOIRE DES CANADIENS-FRANÇAIS

Pemaquid, et au nord jusqu’au Saint-Laurent. Temple s’aperçut qu’on se moquait de ses patentes et que sa fortune était fort aventurée.

Le cap Breton et le grand fief de Denys étaient resté français, comme le montrent les notes suivantes. Michel Le Neuf de la Vallière, né aux Trois-Rivières en 1640, fils de Jacques Le Neuf de la Poterie et de Marguerite Le Gardeur, paraît avoir fait une partie de son éducation en France d’où il revint le 20 août 1657. En 1661, il commandait une expédition destinée à se rendre « à la mer du Nord » par le Saguenay[1]. En 1655, sa sœur Catherine avait épousé Pierre, fils de Simon Denys, à Québec. Jacques Leneuf, mis à la tête des milices (mai 1665) parait avoir envoyé son fils Michel au cap Breton et dans les territoires de Nicolas Denys, où Charlevoix le signale comme officier militaire en 1666. Ce jeune homme avait dû épouser Marguerite-Françoise, fille de Nicolas Denys, en 1665 puisque Alexandre, leur premier enfant naquit au Cap-Breton, ou à Chedabouctou, le 22 juin 1666, comme le constate l’acte de baptême de celui-ci fait aux Trois-Rivières le 2 février 1667. Alexandre de Prouville, écuyer, marquis de Tracy, fut parrain, représenté par le capitaine de Loubia. Cet enfant porta le nom de Beaubassin.

Latour mourut en 1666, probablement chez Muis d’Entremont, dans la presqu’île de Pobomcoup, non loin du cap Sable. Il était alors le seul survivant de ceux qui avaient connu Poutrincourt. De sa troisième femme, madame d’Aulnay, il laissa cinq enfants[2] : Marie, née en 1654, mariée à Alexandre Emmanuel Le Borgne de Belle-Isle ; Jacques, né en 1661, marié à Anne Melanson ; Charles, né en 1664 ; Anne, née aussi en 1664, mariée à Jacques Muis d’Entremont, sieur de Poubomcou ; Marguerite, née en 1665, mariée à Abraham Muis d’Entremont. Les d’Entremont, encore nombreux dans l’ouest de la Nouvelle-Écosse, descendent pour la plupart d’Anne et Marguerite Latour. Les Girouard, les Landry et les Porlier, sans compter d’autres familles, ont du sang de Latour dans les veines par suite d’alliance avec les enfants du fameux aventurier.

La paix de Breda (31 juillet 1667) ajouta au Canada l’Acadie[3] et un havre à Terreneuve où fut érigé un fort. M. Morillon du Bourg alla (1668) au nom du roi de France, prendre possession de l’Acadie et donna à Emmanuel Le Borgne[4] de Belle-Isle le titre provisoire de gouverneur. Les choses en restèrent là pendant deux autres années.

Talon[5] projetait d’ouvrir un chemin entre Québec et Pentagoët. On considérait alors ce poste comme la clef de l’Acadie. En montant la rivière Chaudière, on arrive à la cime des terres, d’où un portage conduisait à la Moose-River, affluent à la Kennebeck ; un second portage permettait de passer de cette dernière à la Penobscot qui débouche dans la mer à Pentagoët.

  1. Voir le présent ouvrage, III. 153.
  2. Élevés par M. d’Entremont.
  3. Dans les provisions de gouverneur-général données à Frontenac le 7 avril 1672, il est dit : « Canada, Acadie et île de Terreneuve et autres pays de la France septentrionale. »
  4. Fils d’Emmanuel Le Borgne, chevalier de Saint-Michel, lequel paraît être décédé vers 1670, si on en juge par une requête de sa veuve, Jeanne François, qui date de cette année.
  5. Envoyé au Canada le 23 mars 1665, cet intendant arriva à Québec le 12 septembre, avec M. de Courcelles. Il retourna en France le 8 avril 1668 et fut renvoyé le 10 mai 1670 dans la colonie, où il débarqua le 18 août. Il en repartit l’automne de 1672 avec M. de Courcelles, aussitôt après l’arrivée de M. de Frontenac.