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HISTOIRE DES CANADIENS-FRANÇAIS

trop grande étendue des dites concessions et de la faiblesse des propriétaires d’icelles, Sa Majesté ordonne que, par le sieur Talon, il sera fait une déclaration[1] précise et exacte de la qualité des terres concédées aux principaux habitants du dit pays, du nombre d’arpents ou autre mesure usitée du dit pays qu’elles contiennent sur le bord des rivières et au dedans des terres, du nombre de personnes et de bestiaux propres et employés à la culture et au défrichement d’icelles, en conséquences de laquelle déclaration la moitié des terres qui avaient été concédées auparavant les dix dernières années sera retranchée des concessions et donnée aux particuliers qui se présenteront pour les cultiver et défricher…

« Les ordonnances qui seront faites par le dit sieur Talon seront exécutées selon leur forme et teneur, souverainement et en dernier ressort comme jugements de cour supérieure… En outre, le sieur Talon donnera les concessions des terres qui auront été ainsi retranchées à de nouveaux habitants, à condition toutefois qu’ils les défricheront entièrement, dans les quatre premières années suivantes et consécutives. »

Cette fois, écrit sir Louis Lafontaine, l’intervention du roi dans les concessions canadiennes se montre plus active et lui fait prononcer contre le seigneur une déchéance plus sévère que par le passé. Il est à propos de remarquer que l’arrêt ne fait aucune mention de la compagnie des Indes Occidentales.

Dans les mois d’octobre et novembre (1672), Talon fit plus de soixante concessions, particulièrement à des officiers français. Si nous ne nous trompons, il n’y avait alors qu’une trentaine de fiefs ou seigneuries en voie de défrichement. Cette fournée de nouveaux seigneurs ou concessionnaires devait bientôt doubler les établissements par tout le pays. Par malheur, la fameuse guerre de Hollande était commencée, et Louis XIV, aux prises avec l’Europe entière, ne tourna plus vers le Canada qu’un œil distrait.

Voici la liste de ces concessions :

À Pierre de Joybert, seigneur de Marson et de Soulanges, lieutenant de la compagnie du sieur de Grandfontaine, au régiment du Poitou, et major en Acadie, une seigneurie située à l’est de la rivière Saint-Jean (Acadie), à côté de la concession de son frère.

À Martin d’Arpentigny, sieur de Martignon, une seigneurie près la rivière Saint-Jean, Acadie.

À Jacques Potier, sieur, de Saint-Denis, une seigneurie près la rivière Saint-Jean, Acadie.

À Mathieu d’Amours, conseiller au conseil souverain, une concession à la rivière Matane.

À Simon-François Daumont, sieur de Saint-Lusson, une seigneurie près la rivière Saguenay.

À Marie-Anne Juchereau, veuve du sieur de la Combe-Pocatière, capitaine au régiment de Carignan et maréchal-des-logis, une seigneurie tenant d’un côté à celle du sieur Nicolas

  1. Cette pièce n’a pas été retrouvée. Elle serait d’une grande valeur.