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HISTOIRE DES CANADIENS-FRANÇAIS

fleuve Saint-Laurent sur trois de profondeur dans les terres, en toute propriété, justice et seigneurie… à la réserve de la foi et hommage que le dit sieur de Chavigny… seront tenus de porter au fort de Québec… par un seul hommage lige à chaque mutation de possesseur… conformément à la coutume de Paris… Et outre ne pourront les dits sieur Chavigny, ses successeurs ou ayans cause et autres qui passeront de France ou qui se trouveront sur les lieux pour habiter et cultiver les dites terres concédées, traiter de peaux de castors et pelleteries avec les sauvages si ce n’est par troc et échange des choses qu’ils pourront recueillir[1] sur les terres ci-dessus concédées[2]… Fera le dit sieur de Chavigny passer jusqu’à quatre hommes de travail au moins pour commencer le défrichement, outre sa femme et sa servante, et ce par le prochain (départ) qui se fera à Dieppe ou à la Rochelle, ensemble les biens et provisions pour la subsistance d’iceux durant trois années, qui lui seront passés et portés gratuitement jusqu’à Québec… le tout à peine de nullité de la présente ; et afin que la compagnie soit certifiée du travail qui se fera pour le défrichement des dites terres, seront les dits… obligés de remettre, tous les ans, entre les mains du secrétaire de la dite compagnie, le rôle des hommes qu’ils feront passer, qui doivent être réputés de ceux que la compagnie doit envoyer… pour former la colonie… Fait en l’assemblée générale des associés en la compagnie de la Nouvelle-France, tenue en l’hôtel de M. Bordier, conseiller et secrétaire des conseils de Sa Majesté, à Paris, le mardi quatrième jour de décembre mil six cent quarante… Signé : Lamy[3]. » Le 16 avril 1647, la compagnie ajoute à cette concession, par l’octroi en fief, et aux mêmes conditions, d’une étendue de terrain égale à la première. « D’autant que le dit sieur de Chavigny nous a fait entendre qu’il a disposé[4] de la plus grande partie des dites terres (concession du 4 décembre 1640) à cens et rentes, au profit de plusieurs particuliers[5], et qu’il en avait besoin d’autres pour les faire pareillement défricher, le tout pour le bien et augmentation de la colonie[6]… »

Le 10 mars 1646, M. de Montmagny, agissant au nom des Cent-Associés, concède à Jean Bourdon, ingénieur et arpenteur en la Nouvelle-France, « soixante et quinze arpents de terre ou environ, en nature de bois et roture, situés dans la banlieue de Québec… bornés d’un côté, au sud-ouest, par la route Sainte-Geneviève, d’un côté, au nord-est, par les terres non-concédées, d’un bout, au sud-est d’une ligne parallèle du chemin qui va de Québec vers le cap Rouge, d’un bout, au nord-ouest, par le côteau Sainte-Geneviève… à condition que le dit Jean Bourdon fera travailler aux dites terres et défrichement d’icelles… » Le 31 octobre, même année, le gouverneur accorde « à vénérable et discrète personne M. Jean Le Sueur, prêtre, curé de Saint-Sauveur[7], la consistance de cinquante arpents de terre ou environ…

  1. À Québec, on commença à vendre du bois de chauffage et à se servir du blé du pays, l’automne de 1645, dit le Journal des Jésuites. Nous savons, cependant, que, aux Trois-Rivières et à Beauport, on récoltait du blé depuis 1634.
  2. C’est la première fois, croyons-nous, qu’il est enjoint aux habitants de ne traiter que des produits de leurs cultures.
  3. Titres seigneuriaux, 375.
  4. Comme seigneur, il y était obligé.
  5. Il est question des habitants partout dans ces deux pièces, et non des engagés.
  6. Titres seigneuriaux, 377. Documents de la tenure seigneuriale, vol. B, 36, 39.
  7. Saint-Sauveur de Thury, en Normandie. Le faubourg Saint-Sauveur de Québec porte ce nom en mémoire de M. Le Sueur. En 1645-6, il était missionnaire à la côte de Beaupré.