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HISTOIRE DES CANADIENS-FRANÇAIS

comme il a fait jusques à ce jour par des effets d’une providence extraordinaire, ce dessein serait pour réussir beaucoup à la gloire de Dieu duquel nous relevons notre couronne, et au bien, avantage et honneur de notre service, et qu’en la dite île dont les terres sont des plus fertiles et mieux tempérées de tout le pays, il s’y pourrait établir quelque puissante communauté qui servirait à l’avenir de refuge assuré aux pauvres Sauvages disposés déjà la plupart à recevoir les remèdes de leur salut, qui à présent n’osent plus fréquenter la rivière au grand dommage des marchands français à cause de leurs ennemis communs les Sauvages appelés Iroquois qui pour l’avantage des armes à feu dont ils sont munis, courent impunément la rivière et tout le pays, pillant et enlevant ces pauvres innocens dépourvus de toute sorte de défense, et après les avoir tourmentés inhumainement les font mourir cruellement. Et parce que les exposans doutent devoir être troublés en l’exécution de leur entreprise s’ils n’ont sur ce nos lettres de ratification et confirmation des dits contrats ci-attachés sous le contre-scel des présentes, humblement requérant icelles ; — À ces causes, bien mémoratifs des bons sentiments que le roi, Henry-le-Grand, notre aïeul avait pour l’avancement du service de Dieu en ces pays comme il appert par plusieurs ses lettres et déclarations qu’il en a faites, confirmées de temps en temps par le feu roi notre très honoré seigneur et père, et particulièrement au mois de mars, mil six cent quarante-trois pour le sujet de Montréal dont nous sommes pleinement informés devoir beaucoup contribuer au bien général du dit pays et conversion des sauvages, et que la puissance royale n’est établie de Dieu en terre que pour y procurer avant toute chose l’amplification de sa gloire ; et ayant en singulière recommandation tous les louables et magnifiques desseins de nos très honorés seigneurs, père et aïeul, Nous, pour donner plus de moyen aux exposans de continuer ce qu’ils ont si utilement commencé pour le bien du christianisme au dit pays, et pour en faire passer par notre exemple l’émulation à nos sujets à la bénédiction de notre règne, de l’avis de la reine régnante notre très honorée dame et mère[1], de notre très cher oncle le duc d’Orléans, de notre cher cousin le prince de Condé et de plusieurs grands et notables personnages de notre conseil, avons les dits contrats et cessions faites aux exposans ratifiés, alloués et approuvés, ratifions, allouons et approuvons par ces présentes, voulons et nous plaît que du contenu en iceux ils jouissent pleinement et paisiblement à perpétuité ; et pour faire vivre les habitans de l’île de Montréal en paix, police et concorde, leur permettons d’y mettre tel capitaine ou gouverneur particulier qu’ils nous voudront nommer, continuer les fortifications et habitations tant pour les Français que pour les sauvages chrétiens qui s’y viendront habituer, leur donner secours de vivres et armes si besoin est ; et pour leur défense ériger corps de ville ou communauté ; faire descendre et monter en liberté par la rivière de Saint-Laurent leurs barques ou canots de Québec à Montréal pour y porter les vivres et munitions nécessaires aux habitans sans qu’ils soient tenus mouiller l’ancre en aucun lieu sinon pour leur commodité ni qu’ils puissent être troublés et empêchés sous quelque prétexte que ce

  1. La Reine Anne d’Autriche, régente du royaume. Le roi Louis XIV était âgé de cinq ans.