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HISTOIRE DES CANADIENS-FRANÇAIS

Le terme Nouvelle-France, déjà vieux de près d’un siècle, puisqu’il avait été impose par Verazani en 1524, continuait de signifier tous les pays, depuis la Floride jusqu’au Labrador, tant les côtes que l’intérieur, Acadie, Canada, Saguenay, Hochelaga, contrées découvertes ou à découvrir dans ces limites ; c’est pourquoi il embrassa, plus tard, le Haut-Canada, mais il ne dépassa pas les grands lacs ; la Louisiane et les postes de la mer de l’ouest (notre Nord-Ouest) portèrent des noms distincts sans être jamais compris dans la Nouvelle-France.

Il n’en est pas ainsi du mot Canada, qui, après Cartier, se répandit vers le golfe et, sous Champlain, remonta jusqu’à l’entrée de l’Ottawa. Plus tard, nos voyageurs désignèrent comme étant le Haut-Canada la province actuelle d’Ontario, et qui, de ce côté, embrassa la même étendue de pays que la Nouvelle-France. Depuis 1867, le mot Canada a envahi successivement le Nouveau-Brunswick, la Nouvelle-Écosse ou Acadie, le Nord-Ouest, la Colombie anglaise, l’île du Prince-Édouard, et la Baie-d’Hudson. Terreneuve, premier pays, découvert officiellement, sera le dernier à porter ce nom devenu si grand après avoir eu pour berceau un humble coin de terre. Les autorités historiques font voir que Kanata ou Canada signifiait amas de cabanes, réunion de huttes, pays peuplé, par opposition, sans doute, aux espaces compris entre le détroit de Belle-Isle et la Grosse-Isle, puis les rapides du Richelieu au Saut, qui étaient sans villages ni demeures fixes. Fidèles au sens de ce mot, les colons français l’ont imposé, de proche en proche, à tout un empire, à mesure qu’ils peuplaient ces vastes contrées. L’amas de cabanes fait aujourd’hui l’orgueil de quatre millions d’hommes.

« Québec » paraît dater de 1600, sinon avant. Il est resté, jusqu’à 1764, confiné au gouvernement de ce nom, enclavé entre ceux de Gaspé et des Trois-Rivières. Toutefois, les évêques de Québec administraient un diocèse qui représentait toute la Nouvelle-France, et même, en de certains moments, toutes les possessions françaises. La province de Québec, constituée par les Anglais (1764), s’avançait, d’une part, jusqu’à Gaspé qu’elle englobait, et de l’autre, jusqu’aux grands lacs et à la Floride. En 1783, elle perdit la portion que les États-Unis entraînèrent dans leur confédération, puis, en 1791, on l’abolit, en créant le Haut et le Bas-Canada. Cette dernière province reprit le nom de Québec en 1867.

Le nom de Saint-Laurent, appliqué au fleuve en général, paraît dater de 1600, sinon 1603. On se rappelle que Jacques Cartier l’avait imposé à une baie sur la côte du nord, un peu avant que de pénétrer dans le fleuve proprement dit.

Le roi Henri n’était pas le moins du monde hostile aux projets touchant le Canada ; mais le cher homme était trop pingre pour y risquer un seul écu blanc. Il aurait volontiers couvert de sa signature une patente demandée par quelqu’un de son entourage, pourvu que cela ne dût rien lui coûter.

Le sieur de Monts, persuadé que Champlain avait raison, s’adressa au roi. Celui-ci prêta son consentement au projet ; mais il le comprit si petitement, qu’il limita à une année la patente (7 janvier 1608) qu’on sollicitait. La fondation de Québec en fut le résultat. Ce