CHAPITRE V
1608 — 11
À la fin de l’année 1607, deux projets étaient proposés : l’un, celui de Poutrincourt, consistait à reprendre les opérations à Port-Royal ; l’autre, celui de Champlain, demandait que l’on fît choix du Saint-Laurent pour y fonder un poste. De Monts était ruiné, ou à peu près. Champlain n’avait jamais possédé les ressources indispensables à une telle entreprise. Poutrincourt avait quelques moyens, mais il tenait pour l’Acadie, et il comptait sur certaines influences pour relever l’établissement de Port-Royal. Madame de Guercheville, personne de grande piété, et qui désirait contribuer à la conversion des Sauvages, avait résolu de débourser les sommes nécessaires à cet objet, mais en Acadie seulement. En vain Champlain lui représenta-t-il, ainsi qu’au Père Coton, jésuite, confesseur du roi, le danger perpétuel qu’il y aurait de se trouver en conflit avec les Anglais le long de ces côtes coupées par un nombre infini de ports, de bouches de rivières, etc. ; il n’y eut pas moyen de la faire pencher pour Tadoussac, Québec ou le Saut. Champlain démontra aussi que les Sauvages de l’Acadie étaient clair-semés, au lieu qu’il y en avait davantage sur le Saint-Laurent ; la personne du calviniste de Monts écartait tout projet dans lequel il pouvait entrer.
Il est à remarquer que l’on désignait, à cette époque, les Sauvages du bas Saint-Laurent sous le nom de Canadois ou Canadiens, ce qui montre que le mot Canada ou Kanata, employé du temps de la découverte (1535) pour désigner la région commençant à la Grosse-Île et finissant un peu au dessus de Stadaconé, s’était étendu et s’appliquait (1608) également à toute la partie inférieure du fleuve, si même, en remontant le fleuve, il n’atteignait pas l’ancien Hochelaga.