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La rue où travaillait Charles Bernard se trouva en moins de dix secondes remplie de gens terrifiés qui se lamentaient de mille manières et qui tous, bien sincèrement, croyaient à la fin du monde.

Il n’y avait pas, en effet, à badiner. Le cri continuait en augmentant de volume. Ce crescendo était épouvantable. Personne ne pouvait expliquer d’où provenait la voix. Personne non plus ne pouvait se figurer à quelle espèce d’animal elle appartenait.

Charles Bernard avait compris cela, et c’était ce qui l’amusait tant.

Le cri continuait et s’étendait de plus en plus. Au lieu du murmure inconnu qu’il avait d’abord fait entendre et qui était déjà suffisant pour effrayer toute une population, c’était maintenant une voix distincte, un souffle rauque et énergique qui remplissait l’air et dont les vibrations portaient la terreur chez les êtres les plus solidement constitués.

Plantés sur leurs jarrets, le corps repoussé en arrière, la tête levée, l’oreille droite, l’œil hagard, les naseaux ouverts, les chevaux s’étaient arrêtés dans les rues.