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traite, où les pelleteries et la morue se disputent la préséance. Longtemps, nous avons enduré ces piqûres d’épingle, avec l’espoir que les communications se multipliant entre l’Europe et l’Amérique, on mettrait un terme à ces inconvenances, — mais rien n’y fait, — on croirait au contraire que le mal va empirant, pour fournir de la pâture à la petite presse des grandes villes d’Europe.

Nous ne le savons que trop, l’imagination des peuples de l’ancien monde a été nourrie d’un seul et même enseignement à notre sujet : nous habitons une contrée barbare, aride, inabordable et nous valons tout juste un peu mieux que les Sauvages au milieu desquels nous sommes disséminés. Voilà ce qui a été imaginé et ce que l’on croit. Hors de là, point d’explication à tenter. Depuis l’époque où les Espagnols, dit-on, ayant abordé dans le golfe Saint-Laurent, à la recherche des mines d’or s’en retournèrent désappointés en murmurant Aca nada, — « rien ici, » — les curieux d’outremer se sont amusés à répéter ce refrain, qui honore leur clairvoyance : rien ici. Rien c’est-à-dire si peu que rien. Notre bilan est fait et déposé.