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réflexions sur l’art des vers

Le vers de douze syllabes est évidemment soumis à cette loi, puisque la césure en répartit également les syllabes entre les deux hémistiches ; son unité de mesure est ainsi la moitié de sa durée totale, par conséquent déterminée par le plus grand commun diviseur qu’une seule césure puisse attribuer aux hémistiches en partageant ce vers. Le partage le moins inégal par une seule césure serait celui où les hémistiches auraient l’un cinq syllabes et l’autre sept ; car ainsi chacun d’eux ne différerait de la moitié du vers que d’une syllabe. Si l’oreille, instinctivement, a répudié ce partage, c’est qu’il prive le vers de tout rythme régulier (les nombres 5 et 7 étant premiers entre eux) alors qu’il en comporte un qui s’offre à elle tout d’abord comme le plus simple à percevoir, le seul d’ailleurs pour une seule césure.

Le vers de dix syllabes comporte aujourd’hui deux modes de divisions différents, l’un tout spontané où la césure se place après la quatrième syllabe, l’autre plus rare (nous dirons pourquoi) où elle se place après la cinquième.