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réflexions sur l’art des vers

entre elles dans le même rapport que les nombres respectifs de syllabes dont ils sont composés, de sorte qu’on ne pourrait pas, dans un vers, supprimer une de celles-ci et en reporter la durée sur la suivante ; substituer, par exemple, une syllabe forte à deux faibles en ajoutant à la seconde la durée de la première. Inversement, on ne pourrait pas non plus substituer deux syllabes faibles à une forte. La raison de cette loi, c’est que la proportion fixe des nombres d’émissions de voix est une condition essentielle de la jouissance auditive au même titre que la proportion fixe de leurs durées collectives dans les hémistiches ; l’oreille aime la mesure dans la répétition comme dans la durée et ne sacrifie pas l’une à l’autre.

Cette loi se vérifie par le procédé habituel des poètes pour mesurer les vers. Ils ne considèrent que le nombre des syllabes ; l’instinct de l’oreille chez eux atteste donc que la mesure du vers français est déterminée par ce nombre.

Deuxième loi.

Dans les vers d’un nombre pair de syllabes,