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réflexions sur l’art des vers

demeurent dans un rapport qui ne saurait être arbitraire, sans quoi il n’y aurait pas de régularité possible pour le rythme. Or, d’une part, nous savons que pour un même vers, une même syllabe variant de durée selon que sa place l’y rend faible ou forte, la durée d’aucune n’y peut servir d’unité de mesure aux périodes rythmiques ; mais, d’autre part, le rythme régulier suppose un commun diviseur de leurs durées respectives ; il faut donc que la somme des durées syllabiques comprises dans l’unité de mesure rythmique soit constante. C’est effectivement ce qui a lieu. On peut le vérifier sur le vers suivant, par exemple :


Le ciel n’est pas plus pur que le fond de mon cœur,


où l’observation est facile, car toutes les syllabes sont comptées par les mots mêmes. Il suffit d’y considérer les trois syllabes que, le, de ; elles seront aussi faibles que la voix voudra les faire, jusqu’à devenir presque tout à fait nulles ; mais plus la voix y passera vite, plus, instinctivement,