Page:Sully Prudhomme - Œuvres, Poésies 1879-1888.djvu/387

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Ils franchissent, après ces milliers de soleils,
De plus hauts firmaments de plus en plus vermeils,
Jusqu’au zénith où meurt l’ascension stellaire,
Où l’astre originel et dernier les éclaire
De l’aube enchanteresse, espoir de leur regard.

Ils arrivent, encore étonnés du départ…

Au-dessous d’eux, là-bas, dans le lointain fourmille
Des mondes imparfaits l’innombrable famille…
Ils en sentent leur être à jamais séparé…
Au loin tressaille encor la peine universelle :
Dans leurs yeux clairs où tremble une humide étincelle
C’est la dernière fois que l’amour a pleuré.
L’entier Paradis s’ouvre, et la Mort les dépose
Où la félicité devient l’apothéose !

______Elle s’écrie : « Entrez vainqueurs
______Dans le triomphe et dans la joie !
______Où l’auréole aux fronts flamboie
______Allumée aux rayons des cœurs !
______C’est là que la houle inquiète
______Des accidents vient s’amortir,
______Entrez donc, pour n’en plus sortir,
______Dans le bonheur, votre conquête !

______« Le bonheur n’est dû qu’à l’effort ;
______Et ceux dont vous craignez le blâme,
______S’ils n’ont point affranchi leur âme,
______N’ont maudit que leur propre tort.