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______Et dans l’ombre, unis pour me suivre,
______Vous élancer à son secours !
______Fidèles à tous les amours,
______C’est d’eux seuls que vous allez vivre ! »

Sur leurs têtes ils voient, de vertige étourdis,
Fondre Cassiopée et le Lion grandis ;
Les polygones d’or s’abaissent, les saluent,
Glissent, puis engloutis derrière eux diminuent.
Comme un œil dilaté par une flèche éteint,
Sirius élargi n’est déjà plus distinct.
La Grande Ourse à son tour, subitement énorme,
Tombe et n’est bientôt plus qu’un point blême et sans forme.
Des Pléiades, plus vif et promptement décru,
Le tressaillant fantôme a soudain disparu.
L’immensité fuyante offre, emporte et dévore
Andromède, Orion, d’autres signes encore,
Persée et les Gémeaux, Castor après Algol :
Le Zodiaque épars s’effondre sous leur vol !
Ils montent, étreignant la Mort qui les entraîne
Là-haut, là-haut où germe une lueur sereine ;
Et tout le peuple astral que l’homme a dénombré,
Ce qu’il nommait le ciel, sous leurs pieds a sombré.
À cette nébuleuse une autre nébuleuse
Succède, puis une autre, en la mer onduleuse
De l’impalpable éther, océan sans milieu
Dont blanchissent au loin les archipels en feu ;
Et ces brouillards lactés qu’ils atteignent et percent
En poudre éblouissante autour d’eux se dispersent.