Page:Sully Prudhomme - Œuvres, Poésies 1879-1888.djvu/363

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


XI

LE RETOUR


Qu’est devenu là-bas le vieux globe vivace
Où luttait par l’esprit et par la volonté
Contre le sol revêche et le fauve indompté
L’homme auguste, qui seul y pût dresser la face ?
Cet astre a bien changé depuis les jours lointains
Où Faustus et Stella par des trépas précoces,
Pour célébrer plus haut leurs éternelles noces,
Furent tous deux ravis vers de nouveaux matins.

L’homme en a disparu. Le céleste silence
Que son verbe sublime y rompait autrefois
N’est maintenant troublé que par d’inertes voix,
Par le bruit sourd du vent dans les bois qu’il balance,
Par la vague rumeur des mers et des torrents,
Par le fracas brutal des aveugles tempêtes,
Par les cris isolés et discordants des bêtes
Qui dans les hauts fourrés poussent leurs pieds errants.