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LE NID BRISÉ


A Giacomelli, sur une gouache qu’il m’a donnée.


Sous leur nid tombé, pêle-mêle,
Gisent leurs pauvres petits corps,
La patte inerte, inerte l’aile,
Les uns mourants, les autres morts.

Suspendus au lien fragile
Qu’un coup de vent rompt aujourd’hui,
Que d’amours dans ce pot d’argile,
Que d’espoirs brisés avec lui !

La mère n’en sait rien encore :
Dans les champs, dès le point du jour.
Pour sa famille elle picore,
Elle reviendra… Quel retour !

Déserteurs du ciel solitaire
Dont les hôtes sont mal nourris,
Bien des moineaux plus près de terre
Acceptent de nous leurs abris !