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faustus

Pardonne-moi, Stella ! (j’en ai porté la peine)
Mon oubli passager de la beauté sereine
Et des plaisirs exquis, du bonheur tendre et fin,
Tant rêvés sur la terre, et savourés enfin !
Pardonne cet oubli, nuage sans durée.
Ma joie est maintenant sans mélange, épurée
Des vestiges derniers de mon plus grand souci,
Le seul qui m’ait hanté, vivace encore, ici.
Quand, tiré de la tombe aux affreuses ténèbres,
Je quittai, radieux, mes vêtements funèbres,
Tout à l’enivrement de mes sens enchantés,
J’abandonnai mon âme entière aux voluptés,
A la surprise étrange et vague de renaître,
A la paix, qui d’abord inondèrent mon être.
Et surtout, dans tes bras, au bonheur sans rival
De posséder réel mon plus cher idéal !
La Nature à sentir m’occupait sans partage,
Et je n’exigeais d’elle, alors, pas davantage !
Mais l’homme avait en moi gardé le vieux levain
Du désir de savoir qu’elle amusait en vain :
J’interrogeai bientôt la coupe enchanteresse.
Le breuvage et la source où je puisais l’ivresse.

stella

______Ah ! l’épreuve m’a coûté cher !
______Tu sondais ton fatal problème,