Page:Sully Prudhomme - Œuvres, Poésies 1879-1888.djvu/285

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Ou bien à ceux qui font de l’espérance une aile
Pour aller toucher Dieu sous son rideau d’azur ? »

N’obtenant du passé nulle ferme réponse,
Faustus au vain secours du souvenir renonce.

Ainsi la lente marche à tâtons de l’esprit
Par l’appel patient à tout ce qu’il apprit
Seul il l’avait refaite en sa longue insomnie,
Étape par étape ; et la route aplanie
Par tous les pèlerins qui l’avaient précédé
N’aboutissait qu’à l’ombre en un temple vidé,
Où désespérément lutte en cherchant sa lampe
Une foi vague avec une raison qui rampe.

Quand un explorateur a seul longtemps marché
Dans le désert aride et mouvant, tout jonché
Des ossements de ceux qui tentèrent la route,
Sans que des eaux du ciel il tombât une goutte
Ni que la moindre source arrosât le sol blanc,
Il se traîne, altéré, d’un pas lourd et tremblant,
Vers les palmiers lointains dont l’appel l’encourage.
Mais reconnaît, hélas ! que c’était un mirage
Et se couche, épuisé, sous le vol d’un vautour.
Ainsi Faustus, ayant dépassé tour à tour
Les monuments épars des humaines doctrines
Et vu s’évanouir, au bout de leurs ruines,
Le fantôme du vrai vainement poursuivi,
Laisse enfin retomber son front inassouvi