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L’écharpe du zéphyr frissonnait sans murmure,
Et molle s’affaissait sur les prés assoupis ;
Le ciel, obscur enfin, couvrit la terre obscure
Comme un dais somptueux parsemé de rubis.

Et le chant déchira, plus large et plus sonore,
De l’azur assombri les voiles plus épais.
De monde en monde allant plus haut, plus haut encore.
Troubler de l’infini l’inaccessible paix.

L’étoile au cœur de feu qui tressaille et palpite
Paraissait écouter avec étonnement
La lyre si puissante et pourtant si petite
Qui vibrait au gosier de son terrestre amant.

______Ah ! que ces notes sanglotantes.
______Ces beaux cris épars, où souffrait
______L’oiseau blessé d’un mal secret.
______Caressaient nos âmes, flottantes
______Du vœu stérile au vain regret !

______Nous pleurions, nous croyions entendre
______Tour à tour triompher, gémir,
______Douter, croire, espérer, frémir.
______Dans cette voix vaillante et tendre.
______Le genre humain prince et martyr.

______Car un mal aussi le tourmente
______Quand, sous les riches nuits d’été,