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IV

HARMONIE ET BEAUTÉ



faustus

Que cette matinée en ce beau lieu m’apaise !
Sa fraîcheur, qui m’inonde et me pénètre d’aise,
Dissout le reste amer de mon terrestre ennui.
Jamais je n’ai senti, Stella, comme aujourd’hui,
La parenté secrète et l’harmonie intime
De l’âme et du bonheur que le printemps exprime.
Cette aurore au sourire immense et caressant
Fait songer à l’espoir d’un grand amour naissant ;
Le tendre affaissement de ce vallon qui rêve
Rappelle l’abandon d’un baiser qui s’achève.
Vois là-bas dans la brume onduler ce coteau,
Rose, au bord d’un lac bleu qui miroite et se plisse :
Il semble qu’une Hébé s’éveille avec délice,
Froissant le lit soyeux que lui fait son manteau ;
Cette haleine est vraiment la grâce qui respire :
Ce qu’elle dit aux fleurs l’amour l’aurait pu dire ;