Pendant qu’il parle, tous se pressent pour l’entendre
Et cherchent à l’envi ses mains pour les lui prendre.
Il croit voir, ébloui par le mouvant amas
De ces beaux corps trempés aux plus divers climats,
Luire, sous leur peau blanche ou jaune, ou brune ou noire,
Et respirer des dieux d’or, de bronze et d’ivoire.
Ils lui charment les yeux, chacun par sa couleur
Dont l’éclat vif ou sombre ou la tendre pâleur
Enchaînant le regard le flatte ou l’émerveille.
Et quelle joie exquise et plus intime éveille
Dans son âme la forme, où par le seul contour
L’esprit parle à l’esprit et l’amour à l’amour.
Où chaque race écrit qu’elle a reçu son moule
Du sol âpre ou clément, triste ou gai, qu’elle foule,
Et dans sa beauté propre enseigne par ses traits
De la terre et du sang les échanges secrets !
Tous ces corps, tes chefs-d’œuvre et ton honneur, ô Terre !
Comme tes plantes ont germé,
Et de chacun le germe a crû, dépositaire
D’un souffle originel, d’un type héréditaire
Après mille ébauches formé.
Tes climats sur la vie, éternelle aspirante,
Ont tous épuisé leur vertu ;
Mais elle, force noble au poids vil inhérente,
Obstinément elle a, quoique frêle et souffrante,
Contre eux sans cesse combattu.