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SONNET


a louis leloir


Pendant que ton laurier, dépassant les cyprès,
Reverdit sous les pleurs, glorieuse rosée.
Je cherche et ressaisis ton âme, déposée
Dans l’image où ta main l’a mêlée à mes traits ;

J’évoque en ce chef-d’œuvre admiré de plus prés
Ton intime personne à ma forme infusée,
Toute la part de l’homme au tombeau refusée !
Et tes coups de crayon s’y montrent deux fois vrais.

Deux fois révélateurs ! car ils y font revivre
Ta propre vision jalouse de poursuivre
Au fond de mon regard ma pensée et mon cœur.

Ta main, sur le papier, de son plus noble geste
A repoussé la Mort et frustré sa rigueur :
Ta vie inaltérable avec la mienne y reste !