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Je laisse dans leur nuit faire leur somme épais
Les pierres, les métaux, tous les êtres inertes,
Où rien ne retentit ni des gains ni des pertes
Qui les changent toujours sans les tuer jamais.

J’ai perdu le sommeil qu’auprès d’eux je dormais ;
Mais je sens l’âme en moi des multitudes vertes
Dont les plaines jadis étaient toutes couvertes,
Et je sais les combats de leur menteuse paix ;

Je me sens oppressé dans les germes qu’étouffe
Des fougères d’alors la gigantesque touffe,
Où le silence est fait d’impuissance à gémir.

Oh ! qu’il en périra de flores faméliques,
Pour qu’en l’âge tardif du soc et du zéphyr
Fleurissent des épis les blondes républiques !




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