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les vaines tendresses.


Afin de la sentir bien nôtre,
Afin de la bien ménager,
Serrons-nous tout près l’un de l’autre
              Sans bouger ;

Sans même lever la paupière :
Imitons le chaste repos
De ces vieux châtelains de pierre
              Aux yeux clos,

Dont les corps sur les mausolées,
Immobiles et tout vêtus,
Loin de leurs âmes envolées
              Se sont tus ;

Dans une alliance plus haute
Que les terrestres unions,
Gravement comme eux, côte à côte,
              Sommeillons.

Car nous n’en sommes plus aux fièvres
D’un jeune amour qui peut finir ;
Nos cœurs n’ont plus besoin des lèvres
              Pour s’unir,