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les destins

       Non le lucide enthousiasme
       Qui naît du vouloir accompli.
       À la fièvre dont il embrase
       Combien préférable est l’extase
       D’un bonheur auquel fut donné
       Le droit pour frontière précise,
       La conscience pour assise,
       Pour faîte l’effort couronné !

       « L’amour, impatient caprice,
       Ne cherche que soi dans autrui,
       Et sa caresse adulatrice
       En mendie une autre de lui ;
       Laissons au monde un juste naître
       Qui, de soi-même restant maître
       Et sachant donner sans retours,
       Jusques à mourir s’aventure
       Pour servir la race future,
       Dût-elle l’ignorer toujours !

       « Ô toi, grande calomniée,
       Ô source de toute valeur,
       Toujours maudite ou reniée,
       Toujours méconnue, ô douleur !