« Permettons aussi que tout passe
Pour rendre à tout la nouveauté,
Et songeons qu’il n’est point de grâce
S’il n’est de fragile beauté.
L’œil, s’il voit toujours la lumière,
N’en sent plus la douceur première :
Pour qu’il en puisse mieux jouir,
Souffrons qu’un peu d’ombre l’offense.
Souffrons que l’être ait une enfance
Pour qu’il se puisse épanouir !
« De l’amour même les délices
Qu’aux lèvres jointes je promets
Ne seront que de chers supplices
S’ils ne sont mérités jamais.
L’âme au fond des douceurs exquises
Qu’elle goûte et n’a pas conquises
Sent la volupté la trahir ;
Une aise plus pure et plus grande
La remplit quand elle commande ;
L’Amour ne la fait qu’obéir.
« Son ivresse obscure est un spasme
Fait d’épuisement et d’oubli.
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les destins