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poésies diverses.

           Quel père illustre honore-t-on ?
Quelle est cette cité qu’un même culte anime ?
           J’en voudrais connaître le nom.
Quand un grand citoyen meurt plein d’ans et de gloire
           Chez un peuple uni, sage et fort,
Tous les cœurs à la fois vénèrent sa mémoire
           Et pleurent à la fois sa mort ;
Ceux mêmes que naguère, aux rostres, aux comices,
           Il a combattus, non trahis,
Disent que ses erreurs autant que ses services
           Respiraient l’amour du pays !
Les seuls qui n’aient pour lui que du respect sans larmes
           Et que rassure son sommeil,
Ce sont les étrangers que, redouté sans armes,
           Il désarmait par le conseil !
La foule, en l’escortant, l’élève au-dessus même
           Des rois sacrés qu’il a défaits,
Préférant le génie élu sans diadème
           À la majesté sans bienfaits.
D’un regret pur de crainte, adieu mélancolique,
           Le peuple entier n’est qu’assombri,
N’ayant pas à trembler pour la chose publique,
           Car le Sénat en est l’abri.
La douleur populaire en pleurs sereins déborde :