Page:Sully Prudhomme - Œuvres, Poésies 1872-1878.djvu/184

Cette page a été validée par deux contributeurs.
172
la révolte des fleurs.


S’il tressaille une giroflée
Au vieux mur qu’on va démolir,
La pioche en est un peu troublée
Et conseille au bras de mollir.

Le faucheur dont le front ruisselle,
Sur sa faux, au bord du sillon,
S’accoude, en suivant la querelle
D’un bluet et d’un papillon.

Quand le pêcheur voit dans l’eau vive
Se mirer un myosotis,
Son filet flotte à la dérive,
Son rêve au cours du temps jadis.

Le long regard d’une pensée
Qui s’ouvre, au soleil, en rêvant,
Et se berce, au vent balancée,
Invite au songe le savant.

Ainsi, la plus simple fleurette
Du devoir fléchit la rigueur,
Et, selon chacun, parle au cœur
Du bonheur qu’il cherche ou regrette.