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LE FLEUVE



LE FLEUVE


À Albert-Émile Sorel.


Vous ne révélez point la destinée ultime,
Ô défunts dans la nuit pêle-mêle noyés !
Dieu seul peut suivre au loin jusqu’à l’extrême abîme
Le fleuve entier des morts qui roule sous nos pieds.

Les beaux yeux, les grands cœurs et les fronts pleins de rêve,
Les couples escortant Juliette et Roméo,
Tous les restes humains vers la brumeuse grève
Silencieux et froids glissent au fil de l’eau.