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À ce signal, dix-huit nègres montèrent silencieusement sur le pont. Un second coup de sifflet avait à peine retenti, que la tartane avait gréé et déployé son antenne, son beaupré et sa trinquette, bordé ses phoques, et que le damné tenait la barre du gouvernail. Les deux lougres s’approchaient de chaque côté, et n’étaient pas à une portée de canon de la tartane, lorsque celle-ci vira de bord, passa intrépidement au milieu de ses ennemis en leur envoyant sa volée, et laissa porter en plein sur la pointe de la Torre, en piquant droit dans le vent. Cette incroyable manœuvre ne pouvait être tentée qu’avec un navire aussi fin voilier et d’une marche aussi supérieure ; or, avant que les deux lougres eussent pris le vent, le Gitano louvoyait déjà sous le promontoire, qui le cachait aux yeux des Espagnols malhabiles qui avaient masqué, et étaient encore occupés à s’orienter. C’est à cet endroit que les habitans de Santa-Maria les perdirent de vue.

À une portée de fusil de la base de ce promontoire, s’élevait une chaîne d’énormes blocs de granit qui formaient, en s’avançant dans la mer, les bords escarpés d’un étroit chenal qui serpentait entre eux et le pied de la montagne, et n’a-