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Tout à coup la flamme faisant une large trouée dans un des flancs du navire, et le grand mât s’abattant du même côté, le San-Pablo donna une forte bande, se pencha sur tribord, et l’eau entra en bouillonnant dans la cale.

Peu à peu le corps du navire s’abîma. Déjà il n’avait plus hors de l’eau que son mât d’artimon, seul resté debout, isolé sur l’eau, et qui flamboyait comme une torche funèbre… Puis, le bas mât disparut ; le mât de hune éleva encore un moment son brandon enflammé ; mais bientôt l’eau frémit autour, et l’on ne vit plus qu’une légère fumée rougeâtre, puis plus rien,… rien,… que l’immensité,… la nuit…

— Tiens ! déjà fini, dit Kernok ; le San-Pablo nous a volé notre argent.

— Vive le capitaine Kernok, qui donne d’aussi belles fêtes à son équipage ! cria Zéli.

— Hourra ! répondit l’équipage.

Et les pirates, fatigués, se jetèrent sur le pont ; Kernok laissa l’Épervier en panne jusqu’au point du jour, et fut goûter quelques instans de repos avec cette satisfaction intérieure d’un homme opulent qui regagne sa chambre à coucher à la fin d’une fête somptueuse qu’il vient de donner.