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gnes de la Normandie, où il était né ; il croyait voir encore la chaumière dorée par les derniers rayons du soleil, le ruisseau limpide et frais, le vieux pommier, et sa femme, et sa mère, et ses tout petits enfans, qui attendaient son retour, soupirant après les beaux oiseaux dorés, et les tissus aux vives couleurs qu’il leur rapportait de ses courses lointaines ! Il croyait voir tout cela, le pauvre homme ! Sa pipe, sa pipe, que le temps avait rendue noire comme l’aile d’un alcyon, sa pipe était tombée de sa bouche entr’ouverte. Il ne s’en était pas aperçu ; ses yeux se mouillaient de larmes ; son cœur battait avec violence. Peu à peu les efforts de son imagination tendue vers un même point, peut-être aussi l’influence du tafia, donnèrent à cette vision fantastique une apparence de réalité ; et le bon capitaine, avisant, dans son ivresse, que la pleine mer était cette riante prairie tant regrettée, eut la folle idée de vouloir aller s’y ébattre. Pour ce faire, il s’avança sur le bord de sa croisée, et tomba à l’eau.

D’autres disent qu’une main invisible le poussa, et que le sciage argenté du navire fut un moment rougi.

Le fait est qu’il se noya.