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sement d’apprécier ces rares qualités. Ce bon capitaine affectionna le jeune matelot, lui donna quelques leçons de théorie, et un beau jour le fit second du navire. Lui, se montra digne de cet avancement rapide, par son courage et son habileté ; il découvrit surtout une manière de caser les nègres dans le faux-pont, tellement avantageuse, que le brick, qui jusque-là n’en pouvait contenir que deux cents, put en porter trois cents, à la vérité, en les serrant un peu, — et en les priant de se mettre sur le côté, au lieu de se goberger sur le dos comme des pachas. — Ainsi disait Kernok.

De ce jour, le négrier prédit à son protégé la plus haute destinée. Dieu sait s’il accomplit cette prédiction !

À quelques années de là, un soir qu’il cinglait vers la côte d’Afrique, le digne capitaine de Kernok ayant bu un peu plus de tafia que de coutume, était de bonne et joviale humeur. Assis sur sa fenêtre, fumant sa longue pipe, il s’amusait à suivre la direction des épais tourbillons de fumée qu’il lançait gravement, ou à regarder d’un œil fixe le sciage rapide du navire, hâtant de ses vœux le moment où il reverrait la France.

Puis il pensait avec amour aux belles campa-