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Un jour, quelques bandes de routiers et d’archers gallois avaient cerné l’abbaye de Saint-Cutberth, en Bretagne. Leur chef, Tortesmains, chevauchait insolemment en vue des remparts, hors pourtant de la portée des traits lancés par les hommes d’armes de l’abbé.

Ce que voyant les moines du haut des murailles, ils invoquaient piteusement l’intercession de Saint-Cutberth, lorsqu’ils aperçurent, non sans étonnement, le nain du prieur, qui portait, ou plutôt traînait après lui, une arbalète prodigieusement lourde et massive.

— Dieu me baille merci ! cria le prieur, le gars a osé porter la main sur l’arbalète inféodée à monseigneur saint Cutberth, dans la nef de notre église !… sur l’arbalète, grand Dieu ! que ce grand saint fit tomber des mains d’un géant, qui en usait pour atteindre les marchands lombards et les pèlerins qui passaient sur les terres de l’abbaye.

— Mais, dit le nain, oubliez-vous, sire, que cette arme transperce le plus solide haubert de Grenade, à mille pas de distance ?